lundi 2 juin 2014

Cap à tribord

Les derniers miles dans la mer des Caraïbes nous ont emmenés vers Antigua, Sint-Maarten et Saint-Martin. 
Ces îles restent sympathiques à découvrir même si l'entrée sur le territoire de chacune d'entre elles est un budget.
Antigua a été notre coup de coeur. Malheureusement, le guindeau fièrement réparé par le Cap'tain quelques jours auparavant a rendu son âme à Falmouth Harbour lors de notre première manoeuvre de mouillage.
Après plus d'un mois à chercher une solution pour cette pièce affaiblie, la question ne se posait plus. Il nous en fallait un neuf.
Du coup, notre escale s'est écourtée malgré nous, le seul endroit pour réparer correctement étant Saint-Martin à 90 miles de là. Nous avons donc fait la clearance d'entrée et de sortie à Antigua le même jour.
Et là !… quelle ne fût pas notre surprise ?!
Alors que la saison touristique touche à sa fin dans les Antilles et que le flot de vacanciers et de bateaux charters s'amenuisent, les customs voient peu d'équipages dans leurs bureaux à cette époque de l'année. Et nous avons eu la chance de tomber nez à nez avec Antoine, le joyeux chanteur/vagabond des mers effectuant un convoyage dans les Antilles.
La probabilité pour que cela arrive était infime et pourtant… Nous avons ses livres à bord, et, le souvenir des premières VHS avec ses récits exotiques est encore très présent dans ma mémoire. Cela a même peut-être été le germe nourricier de mon goût pour le voyage marin. En y réfléchissant, ces réminiscences du passé constituent sans doute mes premiers émois d'aventurière, mes premiers rêves de lagons et de découvertes du bout du monde.
Tant d'émotions se sont bousculées qu'il m'a été presque impossible d'engager une discussion intelligente (ou du moins que j'aurais pu qualifier de pertinente sur le moment…).
Même le Cap'tain est (presque) resté sans voix.
Nous avons cependant eu quelques échanges au milieu de ces fonctionnaires antiguais  très serviables mais plutôt lents et contraints de remplir des liasses de documents qui finiront dans des cartons oubliés d'ici peu. Cette rencontre avec Antoine a illuminé notre journée et le problème du guindeau est passé aux oubliettes pour quelques heures et nous a permis de profiter sereinement de cette courte escale.

L'entrée d'English Harbor à Antigua

Ses anciennes maisons préservées ...

... et reconverties pour la plupart !

Vestiges de la marine anglaise ...

... très bien conservés !

Accueil toujours sympathique


Mais l'équipage n'a pas le temps de s'attarder car la période cyclonique approche à grand pas et il nous faut absolument réparer notre système de mouillage.
C'est le coeur un peu gonflé que nous sommes remontés vers Saint-Martin en laissant Barbuda, Saba et Statia sur bâbord, trois îles que nous aurions bien pris le temps de visiter dans d'autres conditions.

Et puis… l'état d'esprit de l'équipage avait également changé.
Après presque 1,5 an de voyage, les Antilles ont été le berceau de nombreuses réflexions quant au futur.
Fallait-il tourner la barre à bâbord ou à tribord après les Caraïbes ?
Plusieurs sentiments et pensées nous ont assaillis ces deux derniers mois et la décision n'a pas été facile à prendre. Entre les moments de stress, les périodes de mauvais temps ou au contraire de grands calmes, le bricolage incessant, l'argent qui file, le confort sommaire, la famille à distance, et, à l'opposé, les découvertes fabuleuses et uniques, les expériences partagées avec les autres équipages, le sentiment latent de liberté, les situations insolites, les rencontres humaines et culturelles... la balance avait du mal à pencher d'un côté ou de l'autre !!
Chacune des décisions comportait son lot d'avantages et son revers d'inconvénients.
Continuer vers le Pacifique et enfin découvrir ces atolls et ces cultures lointaines admirés sur papier glacé ou tourner la page "Avocet" et ramener notre fidèle destrier en France via une transat retour par le Nord.

Nous écrivons ce post depuis la mer des Sargasses... encore 24 heures et nous serons au royaume des culottes courtes, à savoir les îles des Bermudes (Bermuda Islands).
Vous l'aurez compris, les longues réflexions nous ont finalement poussés vers la droite. Le voyage a désormais une date de fin.
L'équipage devrait se poser au mois de septembre sur la côte marseillaise pour démarrer une nouvelle vie. Mais l'aventure Avocet n'est pas encore terminée, les mois restant à courir sont encore prometteurs et nous amènent vers de nouveaux horizons. Après les Bermudes que nous avons hâte de découvrir, une transat de 1600 miles seulement nous séparera des Açores avant d'atteindre Gibraltar et la Méditerranée d'ici un mois et demi.


Et une belle coryphène au bout de l'hameçon !

Aujourd'hui, les Antilles sont derrière nous. Les souvenirs d'1,5 an de voyage ressurgissent un par un et nous réalisons pleinement la chance que représente cette interlude marine dans nos vies.

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